L'art baroque dans les fresques du palais royal de Madrid (Espagne)
L’art baroque au Palais royal de Madrid
L’art baroque au Palais royal de Madrid se déploie avant tout dans l’articulation intime entre architecture, sculpture et peinture murale. Construit à partir de 1738 sous l’égide de Philippe V, le palais unit un programme stylistique mêlant grandiose baroque et prémices du néoclassicisme dans ses volumes massifs et ses façades rythmées de colonnes engagées et frontons alternés. À l’intérieur, le foisonnement décoratif puise dans la tradition baroque italienne et espagnole pour servir l’idéologie monarchique bourbonienne.
La Chapelle Royale : synthèse baroque
La Chapelle Royale — joyau baroque du rez-de-chaussée — en est l’exemple le plus achevé. Filippo Juvarra en a conçu les lignes théâtrales, Juan Bautista Sacchetti et Ventura Rodríguez en ont dessiné la voûte, mais c’est Corrado Giaquinto qui l’a investie de fresques dynamiques illustrant des épisodes de la vie de saint Laurent. Ses compositions, pleines de nuées et d’apôtres en mouvement, soulignent la verticalité sacrée du dôme et l’orientent vers le chœur, formant une rupture illusionniste avec l’espace architectural réel.
Quadratura et illusion picturale
Sur le plan formel, ces fresques utilisent la quadratura : faux cadres en stuc doré, trompe-l’œil simulant l’ouverture vers le ciel et bas-reliefs picturaux se prolongeant dans l’architecture. Les figures, aux drapés amples et aux gestes exagérés, sont dramatiquement éclairées par le clair-obscur hérité de Caravage et de Lanfranco. Le coup d’œil est constamment happé par les diagonales ascendantes : les regards convergent vers le sommet, où la lumière divine semble littéralement inonder la nef.
Sens politique et religieux
Iconographiquement, la vie de saint Laurent — diacre supplicié mais rayonnant — fait écho à la vocation sacerdotale de la monarchie : pontife temporel, le roi se place sous la protection des martyrs. L’art baroque, ici, sert de langage politique et religieux, rappelant au fidèle l’unité de la couronne et de l’Église lors de la Contre-Réforme.
Un dialogue entre l’Italie et l’Espagne
Sur le plan culturel, l’intervention d’artistes italiens s’inscrit dans la volonté de Philippe V d’imposer une esthétique proche de Versailles, tout en dialoguant avec le goût hispanique pour la couleur et la solennité. Ces fresques témoignent d’un tournant : Madrid, jadis centre d’un empire austère, s’affirme comme capitale éclatante où la peinture murale devient instrument de prestige et de dévotion.
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